Des rizières au dernier étage,
une idée folle qui pousse sur les toits asiatiques


Inspiration thaïlandaise pour application marseillaise

Les toitures végétalisées, véritables oasis urbaines perchées au sommet de nos bâtiments, transforment les paysages citadins en espaces verts luxuriants tout en offrant des bénéfices écologiques et économiques insoupçonnés. Un exemple impressionnant de ce type d'infrastructure est le toit végétal de l'Université de Thammasat en Thaïlande, qui combine technologie de pointe et design durable. Marseille, malgré son climat méditerranéen, peut évidemment végétaliser ses toits. La Thaïlande, située en Asie du Sud-Est , a un climat tropical qui compte principalement 2 saisons : la saison sèche de décembre à avril et la saison des pluies de mai à Novembre. Marseille, avec ses étés secs et chauds, ne peut copier les toitures asiatiques, son climat méditerranéen est contraint d’adapter la végétation et sa gestion.

Le plus grand toit végétalisé d’Asie : Thammasat University

Le studio d'architectes thailandais LANDPROCESS a mis en place l'une des plus grandes toitures végétales d'Asie sur le toit d’une université. Ce toit couvre une surface de 22 000 mètres carrés et a pour but d’imiter les terrasses de rizières traditionnelles, intégrant des solutions de gestion de l'eau et des plantations locales. 
Dans un contexte de dérèglement climatique qui ne cesse de s’accentuer, la  végétalisation réduit les phénomènes d'îlots de chaleur en abaissant la température. On peut observer une différence de 2 à 10 degrés d’écart entre une ville minérale et des espaces verts. Elle contribue également à l'isolation des bâtiments, diminuant ainsi les consommations énergétiques liées au chauffage et à la climatisation. Le design en terrasses infiltre et gère efficacement les eaux de pluie, réduisant le risque d'inondations lors des fortes précipitations en période de mousson.

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Le climat méditerranéen, un atout plutôt qu’un frein

Marseille, malgré son climat méditerranéen, peut tout à fait adopter des toitures végétales en s'inspirant de l'exemple de l'Université de Thammasat. Le réservoir de Lacédémone dans le 6e arrondissement de Marseille offre un exemple concret, à une échelle plus petite, montrant que des solutions peuvent être adaptées aux conditions locales.

Situé en plein cœur de Marseille, ce réservoir d’eau géré par le Société des Eaux de Marseille (SEM) pour le compte de la Métropole, a vu son toit totalement végétalisé par l’agence Par ailleurs Paysages accompagné par des spécialistes en botanique et en environnement. Sur plus de 5000m2, le toit accueille une partie de prairie inspirée de la garrigue basse, une prairie sèche inspirée de la Crau et une prairie de type ancienne restanque comme a pu le mettre en avant le média Made in Marseille.
Cette composition paysagère, bien qu’elle soit relativement discrète,  permet d’une part d’apporter un côté esthétique: le toit du réservoir n’étant pas très haut, les immeubles alentour ainsi que le jardin public Lacédémone jouissent d’une vue sur cette prairie qui fleurit au printemps.

Louis Carmona, publié le 03/09/2024

Sur ce toit, l’eau ruisselle en zigzag, alimentant sur son passage les restanques et les excédents sont stockés dans quatre bassins de rétention pour être réutilisés lors des sécheresses. Une des caractéristiques de ce projet est qu'au-delà d'accueillir des végétaux ornementaux, une multitude d’insectes et d’oiseaux, il abrite une quarantaine de végétaux commestibles : du riz, des légumes et des herbes aromatiques.

Cette ferme urbaine vise l’autosuffisance alimentaire, tout en offrant également un lieu d'apprentissage des pratiques agricoles durables pour les étudiants. La valeur esthétique de cet aménagement est non négligeable : dans des villes de plus en plus denses et artificialisées, des îlots de verdure contribuent à améliorer le cadre de vie.
Enfin, cet espace accessible aux étudiants et au public, constitue un lieu de vie essentiel pour se ressourcer ou créer du lien social au sein du campus. La gestion de ce lieu est assurée par les étudiants eux-mêmes et les services de la ville. 

Les concepteurs de cet espace l’ont pensé comme un réel refuge de biodiversité végétal et animal accueillant de nombreux pollinisateurs, insectes, papillons et oiseaux.  

D’après le suivi réalisé par les paysagistes, 5 ans après le début de la végétalisation, le projet est une réussite avec une végétation et une faune et une flore qui ne cesse de se développer. 

Recréer des îlots de biodiversité dans nos centres urbains revêt une importance cruciale pour renforcer notre résilience face aux changements climatiques. Ces espaces verts contribuent non seulement à la régulation des températures, réduisant ainsi les effets des îlots de chaleur, mais ils jouent également un rôle essentiel dans la gestion des eaux pluviales et la purification de l'air. En offrant des habitats à une variété d'espèces végétales et animales, ils favorisent la biodiversité locale, créant des écosystèmes plus robustes et durables.

La végétalisation comme solution ?

En se parant d'une toiture végétale, l'université thaïlandaise démontre la multitude davantages qu'offre la végétalisation des toits : écologiques, économiques, sociaux et esthétiques. En s'inspirant de ce modèle et en adaptant les techniques aux spécificités du climat méditerranéen, Marseille a l'opportunité d'améliorer non seulement la qualité de vie de ses habitants, mais aussi de renforcer sa résilience environnementale tout en luttant contre la précarité énergétique. Le réservoir de Lacédémone démontre que la végétalisation est non seulement bénéfique, mais surtout réalisable, même dans des climats plus secs. Il est donc nécessaire de continuer à développer ce type de projet pour répondre aux défis auxquels Marseille est confrontée. Même si le réservoir est un très bon début, les acteurs de la ville doivent s'emparer de cette question en intégrant l’accès au public voir une dimension productive pour les futures toitures végétalisées afin que ces espaces exploitent l’entièreté de leur potentiel. 

On nous souffle à l’oreille que d’autres projets du même type sont en discussion…